Le Burkina est-il prêt pour le grand rendez-vous demographique?

Un ancien President Français disait que “la démocratie est un luxe pour l’Afrique”. Je préfère ne pas entrer dans ces hérésies et utiliser cet exemple pour montrer à quel point la démocratie a été et est toujours un grand débat dans nos pays. Mais pendant que l’on se chamaille sur cette question, une autre plus importante à mes yeux se positionne très discrètement: c’est celle de la démographie. Tellement discrète que le Nigeria s’est surpris lui-même quand il est passé première économie Africaine. Penser démographie plus que démocratie, c’est la tache à laquelle l’Afrique devrait plus s’appliquer dans les années à venir. Il en va de sa survie, de sa libération et de sa renaissance. Cette question démographique est encore plus vraie pour des pays comme le Burkina Faso, l’un des pays les plus jeune au monde de nos jours.

La démographie est une arme redoutable

Le mouvement Balai Citoyen le comprend surement à travers son slogan “notre nombre est notre force”. C’est bien une masse de personnes munies d’un arsenal mental qui a réussi à déboulonner un régime politique. Au delà de la politique, il faut savoir l’avantage économique qu’une population nombreuse donne à un pays. Plus il y’a d’habitants, plus l’activité économique se dynamise du fait du grand nombre de consommateurs. Lorsque ces habitants sont aussi des producteurs de bien, de service, d’information, de connaissance, etc, les richesses du pays se voient augmentées du fait du travail fourni par ces derniers. La zone géographique qu’occupe le pays a beaucoup souffert des déportations massives et forcées vers les Amériques des communautés de cette zone plus vulnérables aux razzias négrières. Ensuite, c’est la colonisation qui a utilisé le capital humain pour le répandre dans les zones de travail forcé comme en Côte d’Ivoire ou le long du Djoliba au Mali. Notre histoire est un vrai cimetière qui a considérablement réduit notre nombre et donc notre force au profit de ceux qui l’ont exploité. Mais nous sommes toujours là, le capital humain est resté pendant longtemps la seule richesse du Burkina et c’est l’occasion de rendre hommage aux femmes pour cela, ces femmes qui ont chacune en moyenne 5 à 6 enfants. Le Burkina est donc chanceux, sa population croit à une vitesse très importante malgré une espérance de vie assez courte, les taux de mortalité infantile et de natalité élevés et inacceptables, les maladies, etc. Le Burkina revient de loin, et en 2025, le Burkina Faso qui est 7 à 8 fois plus grand que Taiwan, va finalement selon les prévisions rattraper et même dépasser la population de ce pays qui est de 23 millions d’habitants. 2030 risque d’offrir autour de 30 millions d’habitants au Burkina Faso avec toujours une majorité de jeunes.

Une population jeune

Le Burkina Faso est classe 10ème des pays les plus jeunes au monde selon les derniers statistiques des Nations Unies, avec un âge moyen de 17 ans pendant que notre voisin le Niger a un âge moyen de 14.8 ans. Plus de 65% de la population a moins de 25 ans. Par conséquent, la population active du Burkina est minoritaire, puisque un peu plus de 30% des Burkinabé ont entre 25 et 65 ans. Dans 25 ans, ceux qui sont nés aujourd’hui vont passer dans la population active, ce qui veut dire que l’on aura au moins 60% de personnes active dans ce pays. Les chiffres ne s’arrêtent pas là: en 2050, le Burkina Faso pourrait avoir plus de 30% de sa population entre 10 et 24 ans. Même dans 40ans, on pourra dire que l’avenir est assuré. Pendant que certains pays sautent de joies quand ils découvrent le pétrole dans leur sous-sol, nous devront en faire autant. Le Burkina Faso entre dans une période de longue prospérité démographique. Néanmoins, cette prospérité peut très vite se transformer en une bombe à retardement si on ne fait que assister la bouche ouverte à cette augmentation du nombre de nos siens.

Danger ou opportunité ?

Si l’on réfléchi comme une institution internationale financée par des pays occidentaux, on serait bien tente de dire qu’il s’agit là d’un grand danger et qu’il faudra se préparer à la gérer très sérieusement. C’est d’ailleurs eux qui ont demande aux Africains d’initier les fameuses planifications familiales parce que ces enfants qui naissent sont une charge non seulement pour la famille de l’enfant qui est supposée pauvre, mais aussi pour l’Etat qui devra travailler à lui offrir des opportunités. Cependant, les chiffres nous montrent que ces planifications n’ont pas été un réel succès, ce qui semble être une bonne nouvelle. Si l’on doit choisir une caractéristique commune aux pays d’Asie, c’est leur population très nombreuse. L’Inde est très vite passe “pays émergent” alors que leur niveau de vie ressemble souvent aux pays Africains. Taiwan comme autre exemple, n’a aucune ressource naturelle. Sur ce plan, le Burkina est d’ailleurs bien plus riche que Taiwan. Mais la population a été pendant longtemps un des secrets de la réussite du pays, une population nombreuse, productrice et consommatrice. Alors danger ou opportunité, je préfère me pencher du coté de l’opportunité.

L’urgence est de préparer l’avenir

L’Etat n’arrive pas à s’occuper du problème de chômage actuellement, alors qu’il devra faire face à une majorité de concitoyens demandeurs d’emploi dans les années à venir. La situation actuelle est déjà incontrôlable et il faudra donc apprendre à non seulement la contrôler mais aussi à en profiter. Il est très urgent de mettre en place des politiques et mécanismes qui vont dans ce sens. Si les gouvernements de maintenant ne font rien, les gouvernements de demain auront beaucoup plus de mal ou ne pourront même rien faire. Les quelques milliers de jeunes qui ont marché en octobre 2014 seront des responsables de familles et risquent bien de marcher encore, cette fois-ci avec leurs enfants.

Deux conditions pour en profiter

Je ne voudrais pas jouer à l’expert, mais les deux conditions qui pourraient nous permettre de profiter de cette occasion sont l’Education et le Travail. La plupart des problèmes d’un pays peuvent se régler plus facilement lorsque la population est bien formée, bien éduquée. Il est donc très important de construire des écoles, des lycées, des universités et centres de formations “sans compter”. Sans compter, parce qu’une course est enclenchée avec le nombre grandissant des élèves et étudiants chaque année. Leur nombre est supérieur aux nouvelles places disponibles. En d’autres termes, le nombre d’élèves et étudiants croit plus vite que le nombre de classes et amphithéâtres. Conséquence, les écoles sous paillotes se multiplient, les universités sont bondées. Une petite ile comme Taiwan a plus de 100 universités et le Burkina ne peut même pas en compter 10, il faudra remédier à cela. Il est important également que les gouvernements successifs soient en mesure de contrôler le rythme de travail des citoyens. Et cela se fait très généralement avec la monnaie. La Chine a beaucoup joué avec le yuan pour dynamiser ou ralentir l’économie et elle continue à le faire. Que dis-je … tous les pays Asiatiques jouent avec leur monnaie. Le Burkina étant dans une communauté financière est obligé donc de mettre en place des politiques en collaboration avec les autres membres, mais surtout avec le pays qui s’occupe de l’émission de la monnaie. Cette tache est très difficile mais indispensable.

Nous devons tous serrer la ceinture

Une génération peut et doit se sacrifier pour la suivante. Nous sommes bien conscients des besoins que nous avons tous. Néanmoins, nous devrons pour le bien de notre peuple, commencer à résoudre les problèmes de demain dès maintenant sinon demain sera trop tard ou trop dur. J’ai cette chance d’avoir vécu dans un pays Asiatique où les personnes âgées ont travaille dur pour offrir à la génération d’aujourd’hui le pays qu’ils ont. Nous sommes Africains et en Afrique, l’ultime but d’une famille est de laisser un héritage à sa descendance. Faisons donc de notre pays une grande famille, asseyons nous, discutons puis travaillons à offrir un avenir radieux au Burkina Faso.

Publié sur Burkina24

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